Le scieur de long. 1ère partie.
Jadis, les charrons, les menuisiers ou les charpentiers devaient faire scier leurs bois par des scieurs de long. Ceux-ci travaillaient sur une installation particulière: le hourd.
Pour scier de cette façon, il fallait deux scieurs de long qui se plaçaient dans le fond du hourd. Le hourd était un échafaudage de bois monté au-dessus d’une fosse. Parfois, le hourd était monté à demeure dans la cour d’une ferme ou de l’habitation de ces travailleurs du bois. Une toiture pouvait aussi recouvrir le hourd.
En forêt, on utilisait souvent un échafaudage démontable, sans fosse, que l’on dénommait « tréteau ». « Quand le bois à scier avait été placé sur les traverses, celles-ci étaient montées à la hauteur voulue à l’aide de chevilles (…) qui soutenaient les traverses à chaque extrémité; on soulevait alternativement un bout, puis l’autre, de chaque traverse ».1 Cependant, ce genre de travail était lent et la structure manquait de stabilité. Par conséquent, le sciage était plus fatigant et malaisé. C’est pourquoi la plupart des scieurs travaillaient sur des hourds fixes, avec fosses. Ainsi, même en forêt, on prenait le temps de monter pareil hourd.
Quand un terrain en pente naturelle, il n’y avait pas besoin de fosse : l’on disposait deux « chargeoirs » pour amener les troncs du dessus et l’on étançonnait les montants par des « boutants » du côté de la vallée.
L’autre nom de scieur de long était « scieur aux planches » ou « scieur au haut fer » ou « au long fer » ou encore « scieur aux bras ». Pour qu’un sciage soit de valeur et de qualité, il convenait que les scieurs soient habitués à travailler ensemble. Un travail de sciage d’un tronc pouvait en effet durer près d’une semaine ! C’est pourquoi, généralement, le scieur de long n’aimait guère changer de compagnon.
La journée d’un scieur de long était longue et difficile: travail de 6 heures du matin à 7 heures du soir avec de courtes pauses à 10 heures du matin, à midi et vers 4 heures dans l’après-midi. Du fait de l’exigence du métier et de l’énergie que nécessitait le sciage, les scieurs se donnaient chaud à scier. Il n’était pas rare qu’ils travaillent en plein hiver en bras de chemise ! De même, ces efforts sont intimement liés à leur réputation de buveurs. Etant donné cette énorme dépense physique et l’ai plein de sciure qu’ils respiraient, il était bien normal que ces courageux lèvent le coude plus souvent qu’à leur tour.
Dans la seconde partie de cet article, nous évoquerons les opérations principales du sciage : le tronçonnage, l’équarrissage, le marquage et le sciage de long proprement dit.
Alain-Gérard KRUPA.
1 Pour de plus amples détails, voir: LEGROS, Elisée, Le scieur de long en Ardenne liégeoise in Bulletin des Enquêtes du Musée de la Vie Wallonne, tome IV, Juillet-Décembre 1946.