Dans le précédent article consacré aux arbres communaux, nous avions entamé l’étude des chênes. Cette fois nous évoquerons le cas d’un arbre particulier: « li tchêne al lèveure » ou « chêne à la levure ».
Dans le « Bulletin des Enquêtes du Musée de la Vie Wallonne », André Nélissen1 évoque ce chêne en ces termes: « à l’extrémité nord‑est de la Commune de Plainevaux, un arbre marqua le lieu de rendez-vous d’opération commerciales ou de troc; c’est « li tchêne al lèveure (…) sis en bordure de cet antique chemin qui de Boncelles monte vers le Condroz (L’arbre est visible de la route du Condroz qui coupe le vieux chemin – N.D.L.R.: cette remarque date de 1955-). C’est là que les botrèsses(hotteuses) liégeoises attendaient les habitants de Hody-Tavier et Plainevaux pour échanger les produits de la ferme contre de la levure ».
Afin d’affiner cette assertion, il est intéressant de proposer les précisions apportées par Jean Chalon, citant Renaud Strivay2. Il parle de ce chêne en le situant dans un bois de la commune de Plainevaux, « situé entre les « gonhives » (terrains boisés) de Boncelles et le « Grand Champ » (appartenant à M. Braconnier) »: Là, « se trouve un chêne à l’ombre duquel j’ai joué mille fois étant enfant, et que je revois de temps à autre dans mes promenades à travers le Condroz. On l’appelle le « chêne à la levure ». Chalon explique ce terme en citant ce que lui a confié M. Rémy Loseray, ancien garde forestier. Celui-ci lui déclarait: « Il y a 70 à 80 ans, un certain Emmanuel Garith remarqua que ce chêne avait un trou assez profond (provenant sans doute du heurt d’une charrette ou d’un choc violent d’un instrument quelconque). Par ce trou, s’écoulait une sève abondante sans doute, car il paraît que ce passant s’écria: « tiens, voilà un arbre qui donne de la levure! ».
Quant à Jean-Pierre Delincé, dans son mémoire de fin d’études universitaire consacré à la « Toponymie de Plainevaux », il recense « â tchêne al lèveure », c’est -à-dire au chêne à la levure (sève). Il se situe à la limite de Boncelles sur la voie de Liège.
Bref, les deux versions ne sont que des hypothèses. Pourtant, il nous semble que la première explication soit plus plausible. En outre, il s’agit peut-être de deux arbres différents. La question est posée…
Dans le prochain article, nous évoquerons d’autres noms donnés à des chênes et tenterons d’en esquisser les hypothèses concernant les sens. Citons, par exemple, le « tchêne gottale », le « tchêne as leûs » et le « tchêne delle vierge ».
Alain-Gérard KRUPA.
1 NELISSEN,André,Tilleuls,arbres fétiches et arbres remarquables dans le Condroz liégeois,l’Ardenne liégeoise et le Pays de Herve, in Bulletin des Enquêtes du Musée de la Vie Wallonne, t.IX,1960-62,pp.2-38.
2 CHALON,Jean,Les arbres remarquables de Belgique, Namur, s.d.,pp.328-329.