« La Mémoire est l’Avenir du Passé » (Paul VALERY)
Nous arrivons au XXe siècle: l’apogée du château fait place à un démantèlement qui s’amplifiera au fil du temps. Le contexte économique et social, le désintéressement de ses derniers seigneurs, l’entretien insuffisant des successeurs, les intempéries, le vandalisme sont les diverses causes de ce délabrement de patrimoine. Le milieu forestier exceptionnel du Bois de NEUVILLE, laissé à lui-même, se caractérise par un retour à une forêt naturelle, quelque peu anarchique.
Jusqu’au début de la première guerre mondiale, le château demeure un vestige admirable, véritable symbole de la vie aristocratique du XVIIIe siècle.
En 19141, les Allemands, prétextant que son propriétaire, le baron de TORNACO, communiquait clandestinement avec le fort de FLEMALLE, mirent le château à sac et emportèrent les meubles et les objets les plus précieux en ALLEMAGNE. Pendant la guerre, le baron de TORNACO aurait utilisé un tunnel qui allait du château à la ferme de la HAIE. C’est là que pendant la guerre, il se cacha. Depuis lors, le château demeura inhabité, le baron s’installant dans quelques pièces de la ferme.
Occupé par les armées belges, allemandes et américaines, pendant la deuxième guerre mondiale, le château se délabra de plus en plus.
Le parc et les jardins retournèrent à l’état sauvage. Le 14 décembre 1944, à 20h30, un « V1 » s’abattit au milieu de l’étang occasionnant de nombreux dégâts.
Peu avant la mort du baron François de TORNACO (célibataire) en 1943, la seigneurie de la NEUVILLE s’éteignit. La propriété fut vendue à un fabricant de meubles, M. MICKIELS, qui exploita et saccagea les bois et vendit les plus beaux chênes notamment le célèbre « Chêne Madame ». Il vida le château des cheminées et de tout ce qui pouvait être vendu. Une dizaine d’années plus tard, la « Compagnie Immobilière de Belgique », nouveau propiétaire, commença à lotir; l’immense domaine est irrémédiablement morcelé.
En 1962, le château est acquis par M JACQUEMOTTE. Ce dernier l’exploite en brasserie-restaurant, la ferme en cercle d’équitation, le sauvant de la ruine complète. Il élabore de nombreux projets non réalisés par ses descendants après sa mort prématurée. Durant les trente dernières années le démantelement s’accentue.
En 1994, une nouvelle société en est le nouvel acquéreur qui, le revend peu après, aux actuels propriétaires: La S.A. « Le Vieux Château ».
La population neuvilloise est passée de 600 habitants en 1932, à 3000 en 1974 et 4000 en 1995. A ce jour, la propriété ne compte plus que 18 hectares.
Nous avons fait une approche simple2, une vision historique parfois un peu sèche, pour cerner la vie du château au cours de huit siècles. Notre tentative a été de montrer l’évolution de la bâtisse guerrière en demeure de plaisance aussi impressionnante que digne d’admiration. Hélas le temps s’est arrêté, les vestiges ne sont plus que les témoins de la magnificence du passé d’un patrimoine. Puisse ce patrimoine démantelé être transmis pour sauver les jalons importants de l’histoire du château que les Neuvillois ont communément appelé: « Le vieux château ». Que l’adaptation au présent assure la fidélité au passé, ainsi que le disait Anatole FRANCE : « Les pierres ont abrité des siècles d’amour et de haine, de plaisir et de souffrance… Elles en savent long sur la vie et la mort. Elles nous diraient des choses à pleurer et à rire, si les pierres parlaient. Mais les pierres parlent à ceux qui savent les entendre. »
Agnès DUMOULIN.
1 Notre récit est inspiré des notes rédigées par Monsieur Léon VANGUESTAINE (historien neuvillois) et de la tradition orale.
2 Je remercie les membres de « Mémoire de Neupré » qui m’ont incitée à entreprendre cette recherche et qui m’ont apporté leur soutien. Nous souhaitons compléter notre information et recevrons avec gratitude tout renseignement complémentaire.