R. HERRIN et H. GROSJEAN
1ère Seigneurie – Les Bois de l’Abbaye du Val-Saint-Lambert (3).
Sous secteur n2 – Colline du Bar1.
« … voici l’aspect que présentait, d’ordinaire, un camp de refuge. Il occupait le sommet d’un promontoire, d’un éperon rocheux, isolé de trois côtés par des pentes raides ou à pic, et dont le seul côté accessible, le point faible, était fortement défendu par une solide muraille souvent flanquée d’une tour et précédée d’un fossé, voire d’un ou plusieurs retranchements en terre… »
A l’occasion de fouilles, des tombes gallo-romaines et franques furent mises à jour au sommet.
« … au hasard des choses, en différents endroits, on mit à jour des substructures qui laissèrent supposer que l’éperon fut fortifié et que l’on repense au Chestreal des Croix.
La configuration du terrain et sa situation stratégique semblent assez plausibles.
On a dégagé des murs très épais sur le Bar et une assise de 2 m. d’épaisseur vers Villencourt et l’on parla même d’un sarcophage… Le Parc de l’Abbé aurait-il épousé, en tout ou en partie, l’emplacement du Chateaux des Croix? – G. Claessens – 1963″
1276 « …sire Johan de Flémal condist del Heiz, chevalier »
Après avoir relevé de l’évêque de Liège un fief sis:
« …en la montagne ki siet delez le val-Saint-Lambert sor Mose, en lieu com appelle Saint-Lambert Chasteal… »
y renonce en faveur de l’abbaye du Val-Saint-Lambert.
Il avait:
« …épousé la fille de … Pierre de Ramet…qui lui avait laissé la moitié du dit fief … et l’autre moitié à Amel de Ramet, son seroge… »
1276 « … fait savoir qu’une contestation s’était élevée entre Jean de Flemalle et l’abbaye du VSL … à l’occasion d’un fief situé au lieu-dit St-Lambert Chasteal dont chacune des parties réclamait la propriété…Témoins: Werris d’Astenoit(d’Esneux), Jacques…seigneur de Clermont approuve que son frère Werris …seigneur D’Astenoit… »
Au 14 ème siècle , l’abbaye s’efforce de convertir à la vigne des bois donnés en location (exploitations) ce qui n’arrange pas toujours les usagers traditionnels:
« Che sunt li despens a plantere 3 jounaz de
vinge al Bare… » (Ce sont les dépenses pour plantation de 3 journaux de vignes au Bar)
1346 « … (plusieurs habitants d’Ivoz) … ayant allégué par Gérard de Muse que l’abbé – dom Jakemes li Jai du val-St-Lambert – avait donné … pour faire des vignobles … des bois sur lesquels les habitants d’Ivoz devaient avoir le droit de Weadage (pâturage)… »
1363 « …doit plantir demi fornal de vingnes dedans 4 ans… »
1374 « …trois bonniers qui soloient estre bois et que ons at ors atens planteit a vingue… »
1389 « …terre sor
Saint-Lambert chesteal que Fhiris de Mure jadis, Salhadins d’Yvo et
Giles Bilns avoient planteit a vingne liqueil vingnes or a present
pierdue.. »
1421 » 20 juillet…record demandé à la cour d’Ivoz… Petit Hubert d’Ivoz transporta par devant la cour de ce lieu, à Jean le Bron, demeurant à Villencourt…environ trois journaux en vignoble, terre et jardin, situés au St-Lambert Chastealz…ayant appartenu à Henri Henro de Bressin… »
1426 » 6 mars … Jean le Bron, le vieux, transporte à Wilmot son fils, trois journaux de vigne situés à St Lambert Chasteal et joignant vers Ardenne, au fossé du Grand Thier, du bas à St Lambert Chasteal et vers Meuse au passeal qui va du susdit château d’Ivoz… »
1457 » 2 février… Jean, fils de feu Wilhmot de Bron relève … trois journaux de vigne situés à St Lambert Chasteal… »
En 1777, le flanc Sud du coteau expose un vignoble qui s’interrompt au coin du Parc de l’Abbé.
En effet, au départ de la Tourette (petite tour carrée permettant aux moines de l’Abbaye d’accéder par une arcade à la colline), existe depuis peu un parc accidenté enfermé dans un haut mur. A l’intérieur, au sommet du mont, le « Cabinet de l’Abbé », jolie bâtisse hexagonale, domine vers le Nord le magnifique paysage mosan et ses quatre îles.
« … à la fin du siècle, Dom Grégoire Falla cinquante-deuxième abbé du V.S.L., conçut le projet de convertir cette arête hirsute en jardin d’agrément et en son point culminant d’installer un mirador.
De là, il bénéficierait d’un panorama magnifique s’étendant sur plusieurs lieux à la ronde … » « …le parc établi sur un roc et montagne, n’est qu’un planti d’agrément d’aucun rapport et d’un assez grand entretien dans quel se trouvent plusieurs promenades dans les pentes de chaque côté de la montagne dont on a tiré un parti très agréable.
Au-dessus est un beau plateau en quinquonze fruitier avec un très beau cabinet d’où l’on jouit de la belle vue, ce parc est de deux bonniers dix sept verges grandes, cinq petites et quinze pieds carrés, joignant sur sa longueur vers Meuse à la chaussée (de France), d’arrière et d’amont au bois (Bois de la Croix au château). De même d’aval au chemin de Villencourt (dit de la Tourette) ».
Commentaires des auteurs :
- Le versant boisé Nord, longé actuellement par la Chaussée d’Ivoz (ex-chaussée de France) a porté entre 1804 et 1815 le nom de « Bois Impérial de la Croix au château ». Ceci en fait un des nombreux bois du monastère du Val-St-Lambert saisis au début de la période française.
- Le sommet de ce versant raide est longé, à la limite Nord des prairies de Bar, par une frange de carrières anciennes reconquises par la végétation. Il n’est pas exclu que leur production initiale n’ait servi pour l’érection de la fortification. Il est aussi vraisemblable que cette dernière a été utilisée elle-même comme carrière après son abandon, notamment pour les bâtiments de l’Abbaye.
- La tourette, petite tour carrée au départ du pont galerie menant dès le 18e s ; au Parc de l’Abbé, fut en fait le 2ème bâtiment de ce nom. Il semblerait que la première tour servait d’avant poste de la fortification du sommet. Ce serait successivement l’aménagement en jardin d’agrément au 18ème s. suivi de la houillère du 19ème s. qui aurait fait disparaître les ultimes vestiges du St Lambert chasteal. Relevons que le charbonnage du 19ème s. a fourni du charbon à la cristallerie occupant les bâtiments abbatiaux. A cet effet, un second pont franchissant la rue Villencourt fut construit, en retrait de l’ancien. Les deux furent détruits pour livrer passage au chemin de fer vicinal.
1 Analyse du mot « Bar » – M. COSYNS – Vallée de l’Ourthe – 1919.
« … on a cru reconnaître le mot « Bar » dans le mot Barvaux, dont l’orthographe n’a guère varié; le mot « Bar » désigne souvent des endroits fortifiés (Bar-le-Duc) et la colline située dans un angle des routes (à Barvaux) semble s’être prétée à des fortifications… »
En 1337, le terme « Baire » signifie enceinte, barrière.