Une séance du Conseil Communal, 1979-80
J. STREEL, Echevin de l’Enseignement
Conseil communal 1979-80
Le Conseil communal de Neupré a reçu le Docteur Souris pour le fêter à l’occasion de ses cinquante ans de vie professionnelle.
En plus des membres de sa famille et de ses confrères médecins et pharmaciens, on notait la présence de Michel Hansenne et de son épouse, heureux de se retrouver parmi les « gens » de leur commune comme de simples citoyens.
M. Maystadt, bourgmestre de Neupré, nous décrivit ce qu’est la vie d’un médecin de famille qui s’intéresse autant aux peines, aux joies, aux échecs et succès de leurs patients qu’à leurs maux et leurs maladies. Ensuite, il retraça la vie du Docteur Souris et nous apprit qu’il est né à Nandrin le 27 mars 1904, qu’il conquit en 1929 le diplôme de Docteur en médecine, chirurgie, accouchement et dentisterie, qu’il s’installa à Rotheux en 1933 comme généraliste, avec dépôt de médicaments. Il fut médecin de la gendarmerie, médecin des écoles, du centre de cure de la Rimière, de mutualités, délégué par la justice de paix de Nandrin et de Seraing. Il fonda un comité de Croix-Rouge à Nandrin et à Rotheux, donna des cours de secouriste et créa un centre de prise de sang à Quatre-Bras.
Monsieur Maystadt définit ensuite les activités du Docteur Souris en tant que médecin et que résistant comme: «… un ensemble solide et robuste, une vie toute de courage et d’abnégation, au service des malades… ».
Parmi les nombreuses distinctions honorifiques que reçut le Docteur au cours de sa carrière, le Bourgmestre en cite deux: Chevalier de l’ordre de la couronne avec glaives et Chevalier de l’ordre de Léopold Il.
Il parle enfin du rôle joué par les épouses des médecins: « …rôle étonnant et parfois décisif dans le succès et l’épanouissement des médecins… ».
« Madame Souris, dit-il, nous tenons à vous remercier pour tout ce que vous avez fait en union avec votre mari… ».
Le Docteur remercie Monsieur Maystadt et son Conseil communal.
Puis, avec beaucoup de bonhomie et d’humour, il raconte ce que fut sa vie de médecin pendant les années 30 à 40 et surtout pendant la guerre.
A l’écouter on comprend mieux qu’un des grands soucis d’un médecin généraliste de cette époque était ses moyens de locomotion. Il en parle avec un reste d’inquiétude dans la voix… Arrivera-t-il à temps… avec cette vieille «Impéria» sans suspension, sur des routes en terre battue, sans antigel: il faut remplir d’eau le réservoir au départ et le vidanger à l’arrivée…, sans chauffage: un pavé réfractaire aux pieds…, avec la hantise des crevaisons: en moyenne trois par semaine à cause des fers et des clous perdus sur les routes par les chevaux de ferme.
Il raconte aussi les nuits passées à effectuer des accouchements à domicile… pour 11 F… ! (une visite ordinaire coûtait 7 F). Puis vint la guerre et le Docteur dut reprendre son vélo. «Heureusement, dit-il, en temps de guerre il y a peu de malades… on mange moins. ».
Les Allemands lui permirent ensuite une moto d’un H.P., quatre litres d’essence par mois et le droit de porter le brassard «Arzt» qui lui servait de laisser-passer. Il se procura, en fraude, le fameux Benzol qui vous obligeait à changer de bougie au bout de 3 km. Cela ne l’empêchait pas de porter ses soins jusqu’aux maquisards de Sotrez et du Tronleu où, en plus des extractions de balles qu’il dut souvent pratiquer, il fabriqua pour les résistants atteints de la gale «… des kilos et des kilos de pommade…».
Il eut fatalement des ennuis avec la Gestapo car, en plus de sa collaboration avec la presse clandestine1 et le Service de renseignements «Antoine», il hébergeait chez lui des réfractaires au travail obligatoire en Allemagne.
Il parle enfin de son épouse avec beaucoup d’émotion et de reconnaissance car, dit-il: «c’est elle qui au fil des jours et au fil… du téléphone m’a permis d’aussi bien remplir ma mission », qu’il a exercée sur trois générations. «Et maintenant, dit-il, je me recycle… encore une fois, et je demande à Dieu de me conserver la santé et la vie pour répondre encore longtemps aux appels de mes malades ».
1 Grâce à l’aimable collaboration de Madame Rochette de Plainevaux, nous avons retrouvé à « L’Institut d’Histoire ouvrière, économique et sociale (IHOES) » divers documents dont nous vous parlerons ultérieurement .
Citons déjà des attestations pour la distribution de la presse clandestine. Celles-ci concernent :
DOMBREZ Gilberte, épouse du docteur SOURIS de Rotheux-Rimière
« le responsable soussigné remettait régulièrement à l’intéressée ou à son mari, 20 CHURCHILL-GAZETTE et 20 LIBRE BELGIQUE, édition liégeoise par mois pour la distribution. Elle aide son mari dans cette distribution. Son activité va de juin 1941 à septembre 1944. »
SOURIS Arthur de Rotheux-Rimière
« Distributeur régulier de 20 CHURCHILL-GAZETTE et 20 LIBRE BELGIQUE, édition liégeoise par mois de juin 1941 à septembre 1944. »
THOMAS Lucien de Plainevaux
« De janvier 1941 à septembre 1944 à distribué environ 20 CHURCHILL-GAZETTE et 20 LIBRE BELGIQUE, édition liégeoise par mois. »
THINES Ghislain de Rotheux-Rimière
« Distributeur régulier de 10 CHURCHILL-GAZETTE et 10 LIBRE BELGIQUE, édition liégeoise par mois de janvier 1941 à septembre 1944. »
HENIN Gaston de Nandrin
« Distributeur régulier de 10 CHURCHILL-GAZETTE et 10 LIBRE BELGIQUE, édition liégeoise par mois de janvier 1941 à septembre 1944 qu’il recevait de Mr SOURIS, docteur à Rotheux. »