Louis Toussaint.
A.E. Huy- R.P. Tavier Rég.3 fo 320-321.
Autrefois, le 3 février de chaque année, la communauté de La Chapelle fêtait saint Blaise, le protecteur de la seigneurie. La journée débutait par la célébration de l’office matinal dans le petit oratoire gothique que domine la tour du vieux château. Après la cérémonie, se tenait une grande foire aux bestiaux, où se retrouvaient tous les éleveurs de l’endroit, ceux des villages circonvoisins et les nombreux amateurs de réjouissances populaires.
La fête du samedi 3 février 1736 fut marquée par la fin dramatique d’un participant, victime du déraisonnable pari qu’il tint ce jour-là.
Dans son registre paroissial, véritable chronique villageoise, le curé Jean Peters, délaissant le style laconique habituel des formules préétablies, relate en termes personnels très expressifs « l’ horribilis casus » de ce manant de Limont. Le rapport des faits prend une place importante dans le répertoire événementiel. Voici un bref résumé de ce singulier acte de décès:
Ce jour-là, Jean delle Tour de Limont fit « la gageure de boire à deux coups une bouteille de brandevin (eau de vie de vin) ». Il réussit cet exploit mais, après les nombreux et inutiles efforts qu’il fit pour vomir, il fut transporté inconscient « dans une étable à brebis où on le couvrit de draps et de fumier pour le réchauffer ». Appelé, le curé Jean Peters refusa de se déplacer et le vicaire le remplaça. Celui-ci ne put que constater, durant la nuit, le décès de Jean delle Tour. Aussitôt, précise le curé, ses meubles furent transportés dans une seigneurie voisine (sans doute pour éviter la mainmorte). Le 6, en présence de la justice, « deux chirurgiens visitèrent le corps et déclarèrent ne trouver aucune partie noble offensée », le permis d’inhumer fut alors délivré.
Jean delle Tour a été enterré sous la fenêtre de la chapelle le 7 février 1736. Les nombreux commentaires, diversement appréciés, que suscita cette triste histoire alimentèrent sans doute, pendant quelque temps, les conversations de la communauté.