Dès 1908, André Michelin va rapidement se montrer comme un véritable pionnier de la signalisation routière. A son initiative apparaissent en 1910 les plaques “Merci” à deux faces sur lesquelles étaient indiqués le nom des localités, la désignation et le numéro des routes, et des inscriptions de sécurité telles que “Veuillez ralentir” placées à l’entrée de l’agglomération et un “Merci” à la sortie. Sur le panneau figurait le nom du sponsor (en l’occurrence Michelin). Entre 1911 et 1914, ce sont ainsi 30.000 plaques émaillées qui sont offertes et posées gratuitement dans les municipalités de France.
Dès le lendemain de la première guerre mondiale, André Michelin entreprend seul l’étude d’un appareil de signalisation qui regrouperait sur un seul support toutes les indications nécessaires au bon cheminement de l’automobiliste. En ce qui concerne les panneaux indicateurs, André Michelin eut l’idée d’utiliser des plaques de lave émaillée, plus résistantes et inoxydables, avec comme support massif, du béton armé. La borne d’angle naît ainsi en 1918, mais c’est en 1928 et après quatre prototypes différents qu’elle prend sa forme définitive constituée d’un pied plus large au sol et plus fin dans le support du cube de signalisation. Et ce n’est qu’en 1931 que l’emploi de ce signal est officiellement approuvé. En plus des bornes d’angle, Michelin produit et installe jusqu’en 1939 des “poteaux”, “murs” et “panneaux muraux” de signalisation, auxquels s’ajoutent quelques panneaux de danger et de priorité. Tous ces panneaux portent un bandeau indiquant soit le nom du sponsor (Michelin, TCF…) avec parfois un logo, soit le département ou la région d’implantation.
En 1946 paraît une instruction générale sur la signalisation routière qui annule toutes les instructions antérieures. Homogénéité et cohérence sont désormais de rigueur. L’administration refuse toute forme de don pour la signalisation des routes. Michelin continue cependant sa production de panneaux en lave émaillée sur béton armé, mais ils ne portent plus aucune indication publicitaire. L’usage des bornes d’angle va peu à peu être strictement limité “aux intersections peu importantes”. Les plaques disparaissent au profit de “flèches”, murales ou sur pied.
Mais à côté fleurissent de très nombreux nouveaux panneaux, aux formes et aux graphismes les plus divers. Jusqu’en 1971, année où Michelin cesse cette production, chaque panneau réglementaire aura sa version sur lave émaillée (à noter que sur la fin, cette dernière sera remplacée pour certains panneaux par de l’acier émaillé traditionnel).
Fabrication.
L’extraction d’un bloc dans une carrière de lave et le sciage d’un bloc de lave aux usines Michelin.
La matière première est une lave, pierre grisâtre des carrières de Volvic ou du Mont-Dore (63), en blocs de 1,5m3 pesant 4000 kg.
Transportées à l’usine de Cataroux, les bornes sont débitées en plaques de 15 mm d’épaisseur, à l’aide de lames métalliques fonctionnant dans un courant d’eau et de grès. L’émail est une poudre faite d’argile et d’oxydes colorants mélangés ; elle est finement broyée pendant des heures, et c’est du mariage de cette pierre et de ces émaux que vont naître des plaques de signalisation routière. Émaillées et littéralement cuites au four, les plaques sont chauffées à une température de 800° ; elles sont ensuite refroidies et dirigées sur l’atelier du béton où elles sont disposées à l’intérieur d’un moule métallique. Après coulage du béton, la borne sortira de ce moule, d’une seule venue. La lave adhère parfaitement au béton et fait littéralement corps avec lui.
A de très rares exceptions près, tous les panneaux fabriqués par Michelin sont datés avec précision. En effet, une mention manuscrite sous la forme “jour mois année” est inscrite sur l’émail du panneau, généralement en bas, à droite ou à gauche. La nôtre n’est malheureusement pas datée avec précision.
La borne d’angle est faite d’une seule pièce, en ciment armé. Elle mesure 1,75 m de hauteur et pèse environ 380 kg. Les plaques en lave émaillée comportent l’indication réglementaire des catégories et numéros de chemin, dans notre cas le N pour nationale, une ou deux flèches de direction et une ou deux localités. Le cartouche supérieur colorié varie selon le type de voie abordé.
Des bornes d’angle similaires aux Michelin ont été installées sur les routes de Belgique durant les années 1930.
… et donc, un des ces rares exemplaires se trouve aujourd’hui chez nous !
Sources :
Document rédigé par Monique Limburg.
Texte : “un demi-siècle de signalisation routière 1894-1946” par Marina Duhamel-Herz
Photos : extraites du livre des années 1930 “La borne d’angle” de Baudry de Saunier – Editions Flammarion (Remerciements : Fabrice Franzosi).
Ces renseignements sont tirés du site http://www.panneauxenbeton.fr