Dans le numéro n° 33 des Cahiers de Jadis nous vous proposions l’allocution prononcée, par Alain Gérard Krupa, à l’occasion de l’érection d’une stèle à Houte-si-plou.
Nous vous présentons ci-dessous un bref historique de l’ASBL Université de Houte-si-plou qui est à l’origine de cette manifestation (information issue du site internet). Le 15 décembre 1965, les étudiants et les professeurs de la section française de l’Université catholique de Louvain, après le « Walen buiten » du CVP, cherchent un terrain pour implanter la nouvelle Université. Par dérision et pour montrer à l’opinion publique l’aberration d’une telle décision : la scission de l’Université catholique, ils décident d’installer un nouveau campus francophone à Houte-si-plou !
Le 15 décembre 1995, en donnant la conférence inaugurale « Religions : Qu’a dit Malraux ? Le XXIe siècle sera-t-il celui des religions ? », François Perin donnait le coup d’envoi d’une série de conférences dont le thème varie chaque année académique.
En créant l’ASBL, les fondateurs de l’Université de Houte-si-Plou, ont voulu créer un espace de réflexion démocratique. Les activités sont axées sur des thèmes actuels de réflexion des habitants attachés aux valeurs démocratiques. La méthodologie du groupement a pour objectif d’impliquer un maximum d’habitants de Neupré dans cette réflexion.
Par des conférences, par des débats, par des publications, l’Université de Houte-si-Plou s’attachera à la défense de la démocratie. Tout cela suppose la confrontation de toutes les idées, de toutes les croyances. La démocratie participative est possible. L’homme citoyen, celui qui prend part à nos activités, connaît le prix de la liberté et sait ce qui résulte de la recherche constante d’un équilibre entre l’égoïsme et le désintéressement. Pour la conserver, il faut l’aimer à un moment où chez nous l’individualisme et le repli sur soi sont des tentations de plus en plus fortes…
Les Hauts Fourneaux – d’après une eau forte de Jean Donnay
L’Université de Houte-Si-Plou, un espace historique – Marc LORNEAU.
Il est des traits de caractère qui perdurent à travers les époques et les régimes.
Aussi loin que l’on puisse remonter dans l’histoire et dans la préhistoire – pensons à la richesse archéologique du site de la Roche-aux-Faucons -, Neupré a toujours été un point de contact entre des hommes appartenant à des horizons culturels et institutionnels différents. Sous l’Ancien Régime, les communes appartenant actuellement à l’entité neupréenne sont situées de part et d’autre de la frontière séparant la Principauté de Liège et le Duché de Limbourg. Le territoire de Rotheux, les fiefs d’Englebermont et des Granges relèvent du Comté d’Esneux : celui-ci forme avec Sprimont, Tavier, Villers-aux-Tours, la Chapelle, Baugnée et la Rimière, les sept seigneuries dites « au-delà des bois » dépendant du Duché de Limbourg, lui-même inclus dans les Pays-Bas espagnols et autrichiens.
La seigneurie de la Neuville et les terres de Plainevaux sont localisées par contre en terre liégeoise dont le Prince-Evêque est un vassal de l’empereur « germanique ».
Nés à l’ombre des châteaux seigneuriaux, nos villages et nos hameaux se sont développés aux carrefours d’un réseau de voies de communication terrestres et fluviales qui relient le pays mosan et le Condroz (Nandrin, Villers-le-Temple, Huy, ..) aux Ardennes, mais aussi à la France par Dinant et Givet. L’influence française marque d’ailleurs notre contrée en profondeur.
En 1091, Gislebert, comte de Clermont, cède à l’abbaye bourguignonne de Cluny l’église de Saint-Séverin. Cette église est remplacée au XIIe siècle par le remarquable édifice de style roman qui a subsisté jusqu’à nos jours (église paroissiale Saints-Pierre-et-Paul). En 1192, Gilles de Duras, comte de Clermont et seigneur d’Esneux, donne à l’abbé de Signy ses terres de Rosière, de Strivay et de Plainevaux afin d’y établir une communauté de moines cisterciens dont l’ordre avait été fondé en 1098 à Cîteaux et avait essaimé dans toute la France avant de gagner nos régions.
Le site choisi se révèle cependant incommode et les moines décident finalement de s’établir en 1202 au Val-Saint-Lambert, sur une terre concédée par un Prince-Evêque d’origine française, Hugues de Pierrepont (1200-1229). L’abbaye conservera jusqu’à la fin de l’Ancien Régime des terres et des droits importants à Neuville, à Plainevaux et à la Rimière. Les révolutions française et liégeoise feront table rase des anciennes limites territoriales pour leur substituer en 1795 une nouvelle entité administrative, le « Département de l’Ourte » qui donnera naissance à la province de Liège. La vocation traditionnelle de nos localités n’en disparaîtra pas pour autant, mais elle acquerra une dimension nouvelle sous l’impulsion de la révolution industrielle qui développera considérablement les échanges migratoires, intellectuels et commerciaux entre les villes et les campagnes environnantes.
Dans l’un de ses livres, Renaud STRIVAY (1874-1945) dépeint avec nostalgie son village de Plainevaux et raconte avec quelle joie il accueillait son père « tourneur en fer » aux établissements Cockerill :
« Après six jours de travail, mon père reprenait le chemin du village. Nous ne manquions jamais d’aller à sa rencontre, par la forêt de la Vecquée, et dès que nous apercevions le violet sombre de son sarrau à plis, nous courions à perdre haleine pour lui dire, en termes naïfs, notre joie de le revoir.
[…] Ma mère l’attendait debout dans la clarté du seuil, et quand il s’était assis, elle préparait la table, pour le repas du soir. …Le souper terminé, mon père allumait sa pipe de merisier, parcourait le « Réveil du Rivage » et interrompait souvent sa lecture pour nous mettre au courant de grands événements nationaux et internationaux. » Les Veillées villageoises, 1929
Dans un passé plus récent, le développement des chemins de fer vicinaux et du réseau routier (route du Condroz) va contribuer à désenclaver davantage les communes rurales. La création de cités et d’espaces résidentiels, l’installation de l’Université de Liège au Sart-Tilman seront autant de facteurs qui feront de Neupré et des entités voisines des lieux d’ouverture et de rencontre.