(Extrait de « Plainevaux à travers les âges » Daniel Van Alken)
En ce début de la deuxième moitié du XVIIIème siècle, l’abbaye est plus que florissante. L’exploitation de la houille rapporte gros, les recettes sont considérables et des aides extérieures améliorent encore la situation!
Entre les années 1751 et 1765, l’abbé Joseph Harlez1 (1748-1779) va dépenser 150.000 florins pour rénover et réédifier l’église ainsi que le monastère.
Nous allons avoir la surprise de constater que ces moines étaient choyés et pourtant, il y avait des mécontentements… !
Rien à voir avec la vie des humbles de nos campagnes !!
Quelle était la vie des moines dans ce nouveau cadre et comment « s’arrangeaient-ils » avec la règle de saint Bernard?
La règle de nourriture n’est vraiment pas respectée,
pour preuve les comptes de dépenses des cuisines (de 1753 à 1762):
- Viandes (agneau, boeuf, cabri, chevreau, mouton, porc, veau)
Les viandes sont fumées, salées, séchées ou rôties, souvent servies en pâté ou en sauce.
- Volailles (canard, chapon, coq d’Inde, dindon, oie, pigeon, poulet)
- Poissons (anguille, brochet, carpe, esturgeon, goujon, hareng, morue, saumon, sauret, stockfisch, truite)
- Gibiers (bécasse, cerf, chevreuil, coq de bruyère, grive, lièvre, marcassin, perdrix, sanglier)
- Pain, beurre, oeufs, fromages (Herve et Hollande), épices, thé, écrevisses
- Boissons (brandevin, eau de Spa, vins d’Espagne, de Moselle, du Rhin, de Beaune, de Bourgogne)
- Fruits (abricot, cerises « bigarreau » et « griotte », châtaigne, citron, fraise, noisette, noix, orange, poire, pomme, prune, raisin)
- Légumes (artichaut, asperge, carotte, champignon, chou, poireau, pois, radis, salade, salsifis)
- Sucreries (l’ancien nom était « succade »), (biscuit, confiture, gaufre, tarte)
- Boissons (brandevin, eau de Spa, vins d’Espagne, de Moselle, du Rhin, de Beaune, de Bourgogne)
- Fruits (abricot, cerises « bigarreau » et « griotte », châtaigne, citron, fraise, noisette, noix, orange, poire, pomme, prune, raisin)
- Légumes (artichaut, asperge, carotte, champignon, chou, poireau, pois, radis, salade, salsifis)
- Sucreries (l’ancien nom était « succade »), (biscuit, confiture, gaufre, tarte)
Il y a une grande absente dans ce relevé… la pomme de terre!
En 1779, à la mort de Joseph Simon de Harlez, les religieux du Val-Saint-Lambert réclament à l’abbé de Clairvaux un adoucissement de la règle et de… meilleures conditions de vie! Le prince-évêque Velbrück appuie leur demande en ces termes:
« Monsieur,
Les religieux de Val-Saint-Lambert m’ayant donnipart de la résolution qu’ils ont prise de vous proposer certains points tendants de pourvoir aux besoins de chaque individu du dit monastère que j’ai trouvé très raisonnable, eu égard à leur situation actuelle…»
La réponse de François Lebloy, abbé de Clairvaux, est très rapide et est transmise sous la forme d’un nouveau règlement d’ordre intérieur en 5 articles… assez surprenants!
Abbaye de Val Dieu L’envoi provient de Clairvaux et est daté du 26 juillet 1779.
(Ce document se trouve dans le fond des archives du V.S.L et a été édité pour la première fois par Joseph Deckers dans « Le Vieux Liège »)
Pour votre facilité, je ne reproduis pas les articles tels qu’ils sont écrits dans le document mais j’en respecte le sens.
Article premier
Chaque religieux de la communauté recevra pour sa « vesture» (habillement),cinquante écus liégeois en plus des robes, scapulaires, chaperons et cuculles qui seront toujours fournis dans les temps prescrits par l’usage. Chaque religieux devra remettre la somme des 50 écus au prieur pour éviter les vices de propriété (les vols et les pertes…)
Ce prieur joue en ce cas le rôle de trésorier, il doit donner à chacun la somme demandée au fur et à mesure des besoins individuels. Il tient les comptes et en fin d’année il doit remettre à chacun la somme restante des 50 écus.
Article II
Il sera accordé à chaque religieux quarante-deux jours de vacances ou de sortie libre par année… (s’il les mérite !)
En effet, le Révérend abbé a le pouvoir de les abréger et même de les supprimer s’il est mécontent de « sa conduite particulière» ou de son « manque d’exactitude aux exercices réguliers » (le service du culte etc…)
Article III
Il sera construit dans la chambre de chaque religieux une cheminée pour y avoir un petit feu pendant l’hiver. Le chauffoir commun sera supprimé pour autant que le silence soit respecté et qu’il « ne se fera cuire aucun commestible au feu des dittes chambres ».
Article IV
Tous les religieux seront dispensés des tonsures régulières prescrites « aux festes solemnelles ». Il leur sera en conséquence permis de laisser croître leurs cheveux autant que les saints canons le permettent aux clercs. Ils les tiendront propres et sans aucune affectation qui puisse passer pour une mondanité.
Les supérieurs veilleront exactement à ce que chaque religieux ait une tonsure cléricale conforme au rang qu’il tient dans la hiérarchie.
Article V
Il sera accordé à chaque religieux une demi bouteille de vin au dîner et au souper des jours maigres sans aucune diminution des autres boissons!
Monsieur le révérend abbé est cependant invité à étendre cette faveur aux jours gras si les facultés de son abbaye le lui permettent.
(…hic! Encore un petit coup… cher frère )
Suivent quelques précisions notamment sur l’emploi de 50 écus destinés en habits, linge, effets, blanchissage, rapetassages, thé, café, tabac, vins pour parents et étrangers et viatique de vacances!
On précise aussi que si il y a des abus, du désordre etc., il y a lieu d’en informer Clairvaux afin de revoir un ou plusieurs articles.
Fait en l’abbaye de Clairvaux le 26 juillet 1779, « sous notre seing manuel, celui de notre secrétaire et l’apposition du sceau de nos armes».
Suivent la signature de F.François Lebloy, abbé de Clairvaux, à côté le sceau de ses armes en hostie rouge et plus bas « signé par ordre » F .M.E. Grillot, secrétaire.
Surprenant :
Cent cinquante ans avant les ouvriers de nos usines, ces moines avaient, après revendication, obtenu leurs congés payés!
1 Le 2 avril 1765, Joseph Harlez qui se présente comme abbé du V.S.L et Seigneur de
Plenevaux signe un document pour désigner le nouveau mayeur de Plenevaux : Arnold Fourneau.