1327. La centenaire de Rotheux.

Article paru dans le Journal de Seraing, le dimanche 15 avril 1934.

A Rotheux, vit une bonne vieille qui aura bientôt cent ans.

« Un siècle d’existence n’est certes pas un fait banal et que l’on rencontre tous les jours.

C’est pourquoi, ayant appris que la jolie commune de Rotheux abritait une centenaire, nous avons voulu aller la voir et exposer à nos lecteurs le remède de longue vie que nous pensions obtenir au cours d’un interview de la brave vieille.

Malheureusement, à la suite d’une décision de famille qui ne veut point causer d’émotion quelle qu’elle soit à la vénérable aïeule, nous n’avons pu lui poser nous-mêmes les questions. Mais nous avons tout de même obtenu ce que nous désirions, grâce à l’obligeance de sa fille, Mme Poisseroux.

Ainsi donc, par un bel après-midi du printemps précoce que nous vivons, nous avons franchi la belle forêt des Biens-Communaux, vrai réservoir d’air pur pour nos laborieuses populations.

Rapidement, trop rapidement à notre gré, nous avons atteint le riant hameau de Rotheux dont nous entretenons de temps à autres nos lecteurs.

Deux églises voisinent sur la place communale où nous débarquons et les gens de l’endroit ont vite fait de nous désigner la demeure de la doyenne du village.


La fête de la centenaire. La photo est prise de la rue Bellaire.
Au loin on distingue les quelques bâtiments de la rue des 2 églises.

Une maison proprette et riante où nous sommes accueillis par un roquet d’abord peu jovial mais que la maîtresse de maison a tôt fait de faire taire.

La maison de la centenaire. Vue actuelle.

Nous sommes bien tombés, c’est à la fille de l’aïeule que nous nous sommes adressés.

Immédiatement introduits comme on sait le faire dans nos campagnes, nous n’avons plus qu’à noter les renseignements que l’on va nous donner.

Mme Hubert Halleux, née Octavie Guilmot, est née à Rotheux le 24 août 1834; après une jeunesse besogneuse (on peinait dur en ce temps là dans nos campagnes), elle s’unit dès l’âge de vingt et un ans à un de ses concitoyens, M. Hubert Halleux.

Le ménage trime dur, car rapidement des enfants sont venus; il y en a eu six, dont cinq filles.

M. Halleux faisait tous les jours le chemin de Rotheux à Seraing où il travailla pendant 51 ans aux usines Cockerill. Ce brave travailleur est mort en 1906.

Mais parlons de la centenaire; malgré son grand âge, la bonne vieille, bien que ne sortant plus de sa chambre est encore parfaitement bien portante et, chose extraordinaire, lit encore son journal sans le concours de lunettes.

Eléonore HALLE-UX, née à Rotheux le18-04-1884

La famille Halleux.

Renseignements fournis par Mr Georges LORNEAU.

Hubert Joseph Halleux, ajusteur,° 03-11-1830 (Rotheux) – †17-05-1906 (Rotheux) x31-10-1857 (Rotheux),

Octavie GUILMOT ° le 24-08-1834 (Rotheux-Rimière) – † 24-10-1935

Enfants

Marie Joseph Engénie HALLEUX °09-06-1858 (Rotheux) – †14-05-1873 (Rotheux)
Hubert Joseph HALLEUX, ouvrier d’usine, ° 01-12-1860 (Rotheux), – † 1930, x 10-09-1887 Marie Ernestine Octavie HECK
Marie, Joseph HALLEUX, ° 26-11-1862 (Rotheux), – †02-11-1940 (Rotheux), x Hubert Joseph DEJAES
Eléonore HALLEUX, ° 29-09-1869 (Rotheux) , x Jean Michel BOURGEOIS, x Charles Joseph HEPERS
Marie Mathilde HALLEUX, ° 08-04-1874 (Rotheux), – † 17-07-1906 (Rotheux), x
27-07-1901 Henri Michel GEORGES, maçon ,Poulseur,
Marie Josephine HALLEUX ° 10-11-1876 (Rotheux), x 04-02-1905 Désiré Alexandre POISSEROUX, ardoisierNandrin, ardoisier.


Nous avons également retrouvé cette photo. S’agit-il également de la fête de la centenaire ?
Nous attendons des informations à ce sujet.

Très lucide, Mme Halleux se rappelle encore avoir vu le premier chemin de fer; elle raconte à ce sujet l’évènement et signale que, ce jour-là, elle était allée à Chèvremont, et c’est en revenant du lieu de pèlerinage qu’elle eut l’occasion de voir la première locomotive.

En ce temps, la brave vieille peinait dur pour aider son mari à élever sa famille. Elle s’occupait d’élevage et allait « à la journée ».

Elle raconte à ce sujet que, pendant très longtemps, elle lessiva le linge d’un parent résidant au séminaire de Liège. Elle se rendait, à pied, en cette ville, partant dès potron-minet (sic) et elle était de retour à midi afin d’aller « faire une demi-journée ».

Celle-ci lui était payée vingt- cinq centimes.

De tels souvenirs doivent faire rêver nos populations modernisées qui hésitent à se déplacer quand elles n’ont point un moyen de locomotion.

Est-on plus heureux maintenant?

Quoiqu’il en soit, Mme Halleux a vécu une longue vie heureuse et elle jouit à présent d’un repos bien mérité, entourée de ses quatre enfants encore en vie et des nombreux descendants de ces derniers.

Cette belle famille compte, à l’heure actuelle, cinq générations; en effet, Mme Dejaes, fille de la centenaire a déjà une fille qui est grand mère depuis deux ans.

On cause à Rotheux de fêter comme il convient l’évènement rare d’une centenaire.

Souhaitons que ces festivités ne troublent pas trop la brave vieille, pour qui nous formons les meilleurs vœux de bonne continuation d’une existence laborieuse, honnête et saine.

Gil.