D’après Fernand LAFONTAINE, (malheureusement disparu depuis cette interview) à l’esprit curieux et à la mémoire prodigieuse, la fontaine du Maflot est la plus ancienne du village.
Maflot = mauvais flot, sans doute parce que l’eau jaillissait impétueusement, ne se laissait pas maîtriser et dévalait vers le fond de Rotheux vers Berleur.
Elle s’est finalement assagie et a formé une fontaine qui a donné son nom à la rue riveraine.
Juliette 87 ans
En 1933, Edmond et moi avons acheté un terrain à bâtir, à Rotheux, nous habitions Berleur. Notre choix s’est porté sur un terrain situé à proximité du « Maflot ». L’eau était fraîche et potable, du cresson croissait vert et pur autour de la fontaine et des grenouilles coassaient leur joie de vivre.
Nous nous sommes toujours félicités de la proximité de l’eau car en ce temps là, et jusqu’à environ 1956, les foyers qui ne jouissaient pas d’un puits personnel devaient parcourir plusieurs centaines de mètres voire un kilomètre (la Salle), pour aller quérir l’eau nécessaire aux besoins d’un ménage, tandis que moi je longeais notre
parcelle puis une cinquantaine de mètres dans le fond du terrain et arrivais à la fontaine. Avec beaucoup de facilité je puisais avec un seau car l’eau y affleurait.De petits murs, en briques, s’élevaient pour contenir l’eau, et une dalle les surmontait, servant de toit. A l’avant, un mur moins élevé, permettait de s’y appuyer pour puiser l’eau.
Pour abreuver les animaux, les fermiers des alentours transportaient l’eau à l’aide de petits tonneaux.
Un souvenir agréable était l’animation suscitée par les élèves de l’école toute proche. Criant et chantant, ils se désaltéraient, en formant un gobelet des deux mains jointes.
Cela ne durait jamais longtemps, ils ne devaient pas attirer l’attention de leur instituteur qui leur défendait l’accès à la fontaine, non accompagnés.
L’eau a toujours été fidèle à nos besoins, sur plus de 30 ans. Une seule saison, j’ai été obligée d’aller, au centre du village, chercher l’eau potable, pour l’alimentation. Pour le sanitaire et les nettoyages nous utilisions l’eau de pluie.
Après l’installation des conduites d’eau alimentaire, les quelques riverains du Maflot continuèrent à y puiser l’eau, puis petit à petit nous avons été séduits par la facilité; l’eau dans la maison et avec si peu de peine pour ouvrir un robinet !
Une fois par semaine, j’ai continué à puiser l’eau pour le rinçage de la lessive, je la croyais plus douce pour le linge ! Une de mes voisines, a même innové le « rinçage public », elle chargeait sa « tine » sur la brouette et venait « rispamer » à la fontaine même.
Elle a fait des émules et le lundi la fontaine était le rendez-vous obligé. Etait-ce pour le linge, ou pour les commérages ? Il y a trente ans de cela mais mes souvenirs sont toujours aussi vivaces.
Au fil du temps, la fontaine a été abandonnée, mais elle se venge, son eau n’est plus renouvelée et a perdu ses belles qualités. Elle se cache, au fond de son trou, mais elle est toujours présente et ne demande peut-être qu’un peu de bonne volonté pour être apte au service.
Propos recueillis par Madame BERTRAND