0734. L’Enseignement à NEUVILLE-en-CONDROZ

L’Enseignement à NEUVILLE-en-CONDROZ

Par Joseph FILEE

Et maintenant si nous passions ensemble une journée à l’école?

La classe débute dès 8h30 par la prière et la leçon de catéchisme, ce qui permettait aux rares dispensés d’arriver une demi-heure plus tard. Ensuite, le maître distribue de la besogne aux grands du degré supérieur et aux moyens (3° et 4° années) ce qui lui permet de s’occuper des plus petits. Après une vingtaine de minutes, quand il a donné du travail aux petits, il se trouve en face des moyens dont il corrige l’exercice avant de leur donner une leçon et son application, ensuite il retourne quelques minutes chez les petits qui ont déjà fini leur exercice et qu’il faut de nouveau occuper, pour arriver enfin chez les grands avec lesquels il peut alors travailler avant d’arriver ainsi au moment de la récréation pour recommencer un nouveau tour avant midi.

Cette organisation obligée des classes (plusieurs années réunies, décriée il y a peu mais de plus en plus remise en vogue par les « cycles »), rendait les enfants des campagnes capables de travailler dans un certain bruit et de s’occuper seuls à des tâches scolaires. Elle permettait également de faire participer les élèves les plus doués, à des activités des années supérieures les faisant ainsi progresser plus rapidement. Quelques élèves pouvaient de par cette situation « sauter » une année au cours de leur scolarité. Par contre, l’élève qui éprouvait quelques difficultés pouvait faire un retour en arrière en s’associant aux exercices de l’année antérieure et combler ainsi certaines lacunes dans ses connaissances. Parfois les grands se chargeaient de faire lire les petits ou de les aider dans leurs « calculs ».

Cette dame élégamment vêtue…

Il y eut des éminences pour proposer récemment un palliatif à l’organisation par année trop rigide dans l’organisation actuelle en faisant « monter » le titulaire avec sa classe!!. Pour avoir expérimenté tous ces systèmes , je crois à l’efficacité d’une classe regroupant différentes années successives dirigées par un maître de talent!. Mais arrêtons là ces considérations techniques et revenons-en, non à l’enseignement de l’histoire mais à l’histoire de l’enseignement de chez nous.

Ainsi, comme vous voyez, le maître n’avait guère le temps de s’asseoir sur la chaise de son bureau. Ceci me rappelle une mésaventure qui est arrivée à une Inspectrice de couture. Après avoir examiné les travaux des élèves, cette dame élégamment vêtue d’un tailleur noir s’en alla occuper le « fauteuil » derrière le bureau pour y rédiger son rapport. Quelle ne fut pas l’étonnement (heureusement non commenté), de tous lorsqu’en se retournant pour sortir de la classe chacun put voir un énorme rond de craie grise décorant le fond de sa jupe.

L’après-midi voyait souvent arriver les leçons de sciences, d’histoire, de géographie, de dessin et pour les filles de couture et d’économie domestique. Ces après-midi étaient parfois aussi consacrés à des travaux plus pratiques tels le désherbage des sentiers, la cueillette des fruits ou des légumes de saison, le nettoyage de la classe, bref, toute une série de menus travaux qui nous « incomberaient bien un jour dans la vie quand on serait devenu grand »!!. On ne s’en plaignait pas (on n’aurait d’ailleurs pas osé!).

Quand nous avions été bien sages et fort appliqués, le maître terminait la journée en nous racontant une histoire, un roman-feuilleton, tout comme à la TV actuellement. Les 5 dernières minutes de cours étaient réservées à l’histoire de … Jehan, le preux chevalier ou … Julot, le détective, ou tout autre héros imaginaire. Le hic c’est que l’instituteur ne se souvenait pas d’une fois à l’autre du déroulement des événements car il inventait les épisodes au fur et à mesure et c’était les élèves qui les lui rappelaient. L’histoire redémarrait et se terminait toujours par …  » et c’est alors que … » la cloche sonnait la fin de la journée nous laissant sur notre faim, prêts à être sages le lendemain pour entendre la suite.

Certains jours nous allions en promenade : c’était l’occasion de nous faire découvrir notre environnement: la campagne, le bois, les plantes, le ruisseau, … la nature quoi! C’est ainsi que nous apprenions le principe de la roue à aubes du moulin en construisant des barrages sur le ruisseau non pollué à cette époque où vivaient des cassets, des chabots, des « maclottes » (têtards), parfois même un brochet; un exploit était la construction d’une écluse avec ses portes amont et aval. Nous mesurions, avec nos jambes, le m, le dam, l’hm et le km en utilisant la bonne vieille chaîne d’arpenteur dont la plupart des maillons s’emberlificotaient régulièrement; on visualisait aussi l‘are, le centiare et l’hectare en le jalonnant tous les 100m par un élève; pour le km2 il fallait souvent faire preuve d’une bonne dose d’imagination. Et l’on rentrait fourbu de ces promenades mais riches d’un nouveau savoir.

Nous allions quelquefois en excursion: ceci était un événement; lisez plutôt un extrait du conseil communal du 08.05.1905: »la commune a voté un crédit de 200 frs pour permettre aux grands élèves des écoles communales de visiter l’exposition universelle de Liège.! »


(Jeannine CARLIER, Ghislaine SOURIS, Jeannine GERARD, Marthe GILLET, Jeanne LESENFANTS, Raymonde GONY, Léona LEDOUX, Maria GILLET, Paulette GONY, Fernande DESTEXHE, Yvette WATHY, Claire DELREE, Hélène GURNADE, Laurette DESTOKAY.

Une fois par an nous avions la visite de Monsieur le Docteur. Ceci était moins gai; pour les caries dentaires (et chacun avait les siennes) ça allait, les amygdales aussi (encore que la petite cuiller posée sur la langue provoquait parfois des haut-le-coeur très désagréables); pour la vue, pas de problème avec les lettres du panneau, ça allait encore; il faut cependant que je vous signale que pour les petits de première année qui ne savaient pas lire, on disposait d’un panneau avec des sortes de U orientés dans toutes les directions et Monsieur le Docteur demandait: » Montre moi avec ta main de quel côté le dessin est ouvert« . En effet, si les petits savaient distinguer le haut et le bas, c’était moins évident pour la gauche et la droite!.

Enfin quand il fallait souffler sur son poignet pour que Monsieur le Docteur puisse déceler une éventuelle hernie, on aimait moins parce qu’il avait souvent froid aux doigts.

Nous avions parfois la visite de Monsieur le Curé qui nous posait les questions du « petit catéchisse » comme nous disions et les réponses qu’il entendait ne le faisaient pas souvent rire.

C’est ainsi qu’il me revient en mémoire la réponse d’un condisciple à qui Monsieur le Curé avait demandé : « Que faites-vous avant de vous mettre au lit? » Et la réponse avait fusé sans hésitation : «  Pipi« . Ah que de bons mots spontanés de ce genre n’a-t-on pas entendus. La littérature en est pleine. Il en est un que je n’ai trouvé nulle part. Le voici: après une leçon de sciences, Clément interrogé sur ce qu’on pouvait bien repiquer au jardin en hiver avait tout simplement répondu : « Des hamendes, Sieur! ».

Autre événement important c’était la visite de Monsieur l’Inspecteur. Avec lui c’était assez curieux car notre maître nous soufflait alors les réponses aux questions qu’il nous posait: nous, on ne demandait pas mieux mais on ne comprenait pas très bien le pourquoi. Enfin c’était le bon temps et on ne s’en rendait pas compte!!

En récréation, sur la cour qui n’était pas pavée, nous organisions toutes sortes de jeux: il y avait les jeux d’été et ceux de l’hiver, les jeux spécifiques pour les garçons ou pour les filles, des jeux très actifs ou des jeux plus calmes, rarement des jeux mixtes.

Le choix de tel ou tel jeu commençait par la formation d’une chaîne constituée de 2 ou 3 enfants se tenant par le cou et parcourant la cour en chantant: « Qui est-ce qui joue avec moi à la balle chasseur, aux barres, à la corde à sauter, …  » phrase répétée moulte fois jusqu’à avoir rallié un nombre suffisant de participants.

Ensuite, quand on avait réuni assez de copains pour organiser ce jeu, on « potait« , c’est à dire qu’ayant formé un cercle on récitait une comptine pour désigner celui qui débuterait la partie. C’était : « Pimme, pomme d’or à la violette, pimme, pomme d’or tirez-moi dehors » ou plus simplement : « Cara mute flut! » ou encore « Am, stram, gram, pique et pique et colégram mistram! ». D’autres comptines étaient plus élaborées telle « Un petit cochon pendu au plafond, tirez lui la queue il pondra des oeufs. Combien en voulez-vous? (suivait un nombre et on comptait : 1, 2, 3, …)

Année 23-24. Quelques idées de prix. Excursion à Anvers 40 frs , seulement 11frs 20 pour la Gileppe.

D’autres encore un peu plus cérébrales! » :Pin pan Nicaille, le roi des papillons se faisant la barbe, se coupa le menton, 1,2,3 de bois, 4,5,6, de buis, 7,8,9, de boeuf, 10,11,12, de bouse. Va-t-en à Toulouse« !!. Vous devez en connaître d’autres. Contez-les moi!.

Le dernier à être éliminé prenait le mouchoir ou la balle ou tout simplement il était « en est« !, c’est-à-dire celui qui devait poursuivre les autres dans le jeu de « touche-touche » par exemple. Les filles organisaient des rondes dansantes en chantant … Attendez que je me souvienne … « Chantons en choeur, jeunes fillettes, le ciel est bleu car en ce jour c’est la fête des rosettes. Trois jeunes filles au fond du bois; laquelle est la fille du roi? Lise komme, Lise komme autre part et à la fin la plus belle c’est la mienne on s’embrasse chérubin« . Et on reprenait au début. Vous pourriez certainement m’en chanter bien d’autres, non?

La même excursion pour les garçons. Anvers 1949. Marcel FURNEMONT, Eli DAPER, Willy BLOEMARTS, Arthur DETHIER, Paul MARECHAL, Claude CHATELAIN, Pierrot LESENFANTS, Jean-Pierre BASSER, Ernest GERARD, José GALDEROUX, Gustave BLOEMARTS.

Un jeu mixte était celui des billes. On commençait par creuser les « pottes » qu’on faisait d’un coup de talon. « Regardez le petit Jules qui a fait une aspagne et qui pointe de sa « tchac » la belle bille en verre torsadé du grand Péco: pourvu qu’il ne la lui fasse pas éclater« ! A ce propos, j’ai vu des filles dont le coup de pouce était redoutable dans pareille situation.

Dans le fond de la cour quelques petits jouent à la balle chasseur: des casquettes sont alignées le long du mur et un des garçons lance la balle vers les coiffes. A ce moment tous s’égaillent sauf Arthur dont le bonnet contient la balle qu’il doit saisir pour la lancer vers un condisciple. Les grands jouent aux barres et j’entends une discussion : en effet, Oscar prétend qu’il avait barre sur son frère puisqu’il est sorti après lui de son camp! Allez savoir?

Les filles quant à elles jouent au mouchoir : elles forment un grand rond et l’une d’entr’elles court à l’extérieur ayant en main un mouchoir qu’elle jette derrière l’une de ses amies laquelle s’empresse de le ramasser puis tente de rattraper la précédente qui s’efforce d’occuper la place libérée par sa suiveuse tout en se déchargeant elle-même du mouchoir ce qui provoque un nouveau départ, et ainsi de suite! Vous m’avez suivi? Un jeu plus calme est « la posture » … Ah que de grâce, d’élégance, de positions avantageuses!! Il y a aussi « l’élastique » qui se joue à 2. Un autre: au toucher ou au chat perché, et j’en passe. (Voyez pour cela les articles de Madame Bertrand dans les numéros des Cahiers de Jadis).


Neuville – Classe de Mademoiselle CLABOTS – 1965-1966
Au dernier rang:
? – Jean-Louis VAN BOECKEL – Alain COLLIGNON – Pascal FILEE – JeanManuel JAMAR – Jean-Marc STETENFELS – Guy DESTEXHE- Patrice DESTIN
Rang du milieu : LANDRAIN – Patrick HOBE – Philippe BRAQUET – Michel DERYCHER – Jocelyne CHRISTOPHEL -?- Béatrice MERTENS – Françoise ETIENNE.
Premier rang : ?-?-?- Gilberte ETIENNE – Chantal VAES – Pascale VANGAMPLAERE – Chantal TORFF – Jacqueline BASTIN

Neuville – Classe de Monsieur Joseph FILEE – 6éme année 1964-1965.
Dans le fond debout :
Christian PEETERS – Jacques SAUVAGE – Jean-Claude REMY-Giocondo MAZZIER – Jean-Michel DESCHEPPERS – Patricia MARECHAL – Patricia MARECHAL -Marie-Josée GILLET – Maryse DALBO – Myriam LEJEUNE.
Marek Jean Michael De SCHLEPPERS – Pain MARECHAL
1 er banc : Danielle WOIT – Michel HENRION – Nelly HULSMANS
2ème banc : Liliane LECLERE – Nicole LECLERE – Evelyne GEYS
3 eme banc : Michèle RUELLE – Maryse MOELANS – Dominique FILEE 4ème banc : Myriam DELBROUCK – Bernadette ZOZENONI – Fabienne GALERE