1455. La « cascade » du Bruta.

Daniel Van Alken

 brouta

Endroit bien connu et tout à fait particulier au village de Plainevaux où se trouve une charmante cascade artificielle.
Le nom donné illustre bien le bruit que l’eau fait en tombant.
Malheureusement, je n’ai trouvé aucune allusion sur cette cascade dans les documents anciens consultés ! L’appellation la plus ancienne où l’on écrit « Bruta » date de 1920 

Nous pouvons observer au moins trois transformations successives. Le mur, la voûte et au centre les solides blocs de pierre formant l’assise de la cascade.

Plusieurs ruisselets prenant naissance dans la forêt de la Vecquée (territoire de Seraing avant les fusions des communes) alimentaient par un système assez complexe les étangs et les douves défensives du château. C’était donc, à l’origine, le trop-plein qui s’écoulait à cet endroit pour former le ruisseau de Plainevaux.

L’énergie hydraulique a-t-elle été récupérée à une époque ancienne ?

Plusieurs indices pourraient le faire penser mais jusqu’à présent je n’ai trouvé aucun document pouvant confirmer la chose. La légende de Hullos situe sa forge près de ce lieu assez typique !

Bref, étant très intrigué par le manque de documents anciens parlant de ce lieu pourtant si particulier, j’ai consulté de nombreuses fois d’anciennes cartes, j’ai été remesurer sur le terrain et « Eurêka », la solution était là, devant moi et visible… sur plusieurs cartes !

Avant 1860, le Bruta n’existait pas ! Et le pont qui traverse le ruisseau non plus !

L’ancienne route de liaison était la suivante : en descendant la Croisette, on continuait à descendre la Croupée (Coupsée, en 1720 ; maintenant une partie de la Rue du Centre) et l’on tournait à droite pour se diriger vers le château en longeant le ruisseau.

Avec une charrette, le passage de l’eau se faisait à cet endroit.

  • Pour remonter le tige de Fawes et rejoindre Rotheux en passant par la Ruelle du Saint-Sacrement, la Rue Linette et le Trou Bottin !

(En principe… car en réalité ce chemin était en si mauvais état qu’il fut bientôt impossible aux charrettes d’y passer pendant plus de 50 ans !).

  • Pour aller au centre du village, à l’église ou même au moulin en suivant le chemin, aujourd’hui disparu, qui longeait le ruisseau.

Le plan Popp montre encore le chemin près du Bruta et il bien visible sur des cartes plus anciennes : la courbe du chemin traversant le ruisseau à cet endroit est inversée !

Et… il n’y a pas de cascade !

Il semble (par divers recoupements) que cette cascade a été réalisée entre 1860 et 1870, après le détournement du chemin et la construction du pont de pierres permettant de franchir le ruisseau 300 m en aval.

En 1881, année où Renaud Strivay est venu habiter Plainevaux (d’abord près du Bruta et ensuite au Caser), il parle dans ses souvenirs de la cascade et du magnifique pont de pierres qui est proche… mais jamais il n’écrit le nom pourtant si particulier de Bruta !

Vérification faite avec le recul de la limite des anciennes maisons de l’endroit, il n’y a aucun doute possible, la route passait à l’endroit du Bruta, c’était un gué !

A notre époque, cela est surprenant et ce n’est pas toujours évident de se « replacer » dans la logique des temps anciens.

Par un heureux hasard, j’ai retrouvé des plans de cette fameuse cascade.

Voici un exemple des transformations prévues.
Plans datant du 30 août 1939… (le vocabulaire employé est bien bruta)
Ils sont dressés et signés : Florquin

Il est question de rénover l’endroit qui n’a certainement subi aucune transformation depuis sa construction vers 1865. La « chute » comme le précise d’anciens textes sert à remplir les « tonneaux roulants ».

Fait curieux : une statue est prévue !

Le mur existant de pierres sèches doit être réparé et agrandi, la surface visible doit être recouverte de pierres de roches, après avoir coupé l’arbre qui restera la propriété de l’entrepreneur.

Un socle de béton armé est prévu ainsi que l’ancrage nécessaire à la statue.

Cette statue a une hauteur d’un mètre soixante et elle a été choisie dans le « catalogue » de Saint-Georges, elle y figure sous la référence « La pêche » !

Un support armé est prévu pour le tuyau de sortie…

La « drôle » de guerre et les premières mobilisations de 1939, allaient faire complètement oublier ce projet assez sympathique…