Tailleur de Pierre

A L’HEURE OUL’INDUSTRIE DE LA PIERRE EST MENACÉE UN JEUNE ROTHUSIEN RAPPORTE A LA BELGIQUE LA MEDAILLE D’ARGENT AU CHAMPIONNAT DU MONDE DES TAILLEURS DE PIERRE QUI S’EST DERNIÈREMENT DÉROULÉ A CHIBA, AU JAPON

Ces dernières années, on a beaucoup parlé de l’industrie de la pierre dans la région condruzienne, malheureusement avec une certaine amertume !

Les ouvriers carriers ont été forcés, pour diverses raisons à changer de travail ; des chantiers sont abandonnés ; une végétation recouvre les nombreux terrils des vallées de l’Ourthe et de l’Amblève , où seules quelques entreprises se sont reconverties en fabrication de concassés calibrés, ou en industrie de luxe (pierres spéciales belges ou étrangères) ; c’est l’exode des travailleurs vers le bassin liégeois et dans la plupart des bourgades de la région Ourthe-Amblève, on s’est tourné avec espoir vers une nouvelle industrie : le tourisme.

Un jeune tailleur de pierre wallon se distingue.

Au début du mois de novembre, nous avons fait la connaissance d’un jeune tailleur de pierre, François Boulanger, 20 ans, désigné pour représenter la Belgique au championnat du monde qui se déroula au lapon. Nous avons trouvé François Boulanger travaillant au chantier de Rotheux-Rimière en compagnie de son père Antoine et de son cousin et patron Amédée Boulanger. Dans le jardinet devant la maison, deux œuvres d’art taillées dans le granit : une tour Eiffel et un Atonium miniature. Amédée Boulanger exploite le chantier de Rotheux depuis 1946; il compte actuellement 36 ans de pratique du métier de tailleur de pierre; Antoine lui en compte 40. Parmi les travaux importants effectués par les Boulanger : le monument du cimetière américain de La Neuville.

François Boulanger est né à Rimière le 12 juillet 1950. Il est fils unique et effectue en ce moment son service militaire à Düren. A l’âge de 16 ans, il commence « dans le métier » avec son père et en même temps, il suit les cours au Secrétariat d’Apprentissage à Ouffet. L’été dernier, au cours du championnat de Belgique des tailleurs de pierre organisé dans une carrière d’Ouffet, il enleva la première place devant son collègue d’Aubel Etienne Pesser et fui désigné pour représenter la Belgique au championnat mondial au lapon.

La médaille d’or a failli revenir en Belgique.

Le voyage au Japon était organisé Par le Comité de Formation Professionnelle des Métiers et Négoces. Quinze corporations belges y étaient représentées. Les sélectionnés s’embarquèrent le 15 novembre pour Chiba, une ville située à une cinquantaine de kilomètres de Tokyo.

Contrairement à ce qu’il avait espéré, Françis Boulanger est parti sans préparation. Il est arrivé sans avoir la moindre idée de la dureté de la pierre à travailler. Ses outils, réduits au minimum, par suite de la limitation du poids des bagages, étaient prévus pour une matière dure comme le granit belge. Comble de malchance, la pierre japonaise est tendre et friable.

Malgré ce handicap important, le jeune belge s’en est tiré avec tous les honneurs. La pièce imposée, une pierre d’angle servant de socle de porte, a été terminée en 21 heures par notre représentant tandis que le candidat anglais (le vainqueur) a effectué le même travail en 27 heures.

Les travaux turent examinés par les 65 membres du jury. Au pointage l’Anglais l’emportait sur notre compatriote par un écart minimum de 2 dixièmes de point. Voici les résultats :

1) Angleterre (médaille d’or)
2) Belgique (médaille d’argent)
3) Allemagne (médaille de bronze) ;
4) Hollande
5) Corée
6) Japon.

La remise des prix a eu lieu en présence du prince Akihito, de la princesse Mickiko et du ministre du Travail M. Nokira.

Par l’intermédiaire d’un interprète, Françis Boulanger eut l’honneur de converser avec la princesse. Notre compatriote garde du Japon des souvenirs nombreux et des images grandioses des villes et sites qu’il a visités.

La Belgique lui doit de chaleureuses félicitations. Quant aux tailleurs de pierre du Condroz, ils peuvent être fiers, la renommée de leur profession est sauvegardée, et, grâce à un jeune wallon, l’industrie de la pierre redevient un centre d’intérêt.

André COMPERE.