1795 Les cloches de la Chapelle Eglise NotreDame de Neuville

Ferdinand M. Dessente

Notre regretté membre et ami Joseph FILEE et moi-même avons déjà écrit à propos des cloches de notre église mais de manière occasionnelle (Cfr. Les cahiers de jadis Nos 3 – 24 – 29 et 32). Cependant on n’a jamais publié le texte relatant la fonte d’une des deux cloches parce que fêlée, ce qui arrive parfois, (elle pesait 92kg) et son remplacement par une plus grosse et donc plus lourde (197kg).

Exemple de cloche félée

C’est à partir de 1724, à l’occasion d’une remise en état complète du bâtiment et du mobilier de l’église, alors encore chapelle que cet événement eut lieu. Cette entreprise fut l’œuvre du recteur de la chapelle d’alors, Pierre DOSSOGNE. L’événement fut consigné dans le Registre paroissial N°l, commencé en 1632, pour en justifier les débours. On trouvera plus loin le texte tel qu’il figure aux pages 132 et 133. L’orthographe est tout simplement savoureuse.

Plus tard, les deux cloches furent plus que probablement réquisitionnées entre 1795 et 1799 sous l’occupation française (1795-1815). Elles servirent de matière première à la fonte des canons de l’armée républicaine. Ce fut aussi le cas en 1795 des sept grosses cloches de la cathédrale St-Lambert. Parmi elles, celle offerte en 1533 par Erard de la Marck, d’un poids de 16.000 livres (7,5 tonnes!).

Ce n’est qu’en 1860 que l’église est à nouveau pourvue de deux cloches. Comme pour la cathédrale St-Paul, qui avait remplacée la cathédrale St-Lambert détruite, ce fut la famille de fondeurs de cloches, les VAN AERSCHODT de Louvain, successeurs des fondeurs VAN DEN GHEYN, également de Louvain, qui coulèrent nos deux nouvelles cloches. En atteste une des deux inscriptions qu’on peut lire sur le pourtour de nos cloches :

« ME FUDIT A.LJ. VANAERSCHODT MAJOR SUCCESSOR A.L. VANDENGHEYN LOVANIE » (M’a coulée A.L.J. VAN AERSCHODT principal successeur d’ A.L. VAN DEN GHEYN de Louvain). Cette mention est complétée par la suivante qui donne la date de 1860 pour la fabrication de nos cloches :

« ME AERE COLLATO BEATE VIRGINI LAETI DICARANT » (Par l’airain consacré, que joyeux ils me dédient à la Bienheureuse Vierge). Les majuscules du texte forment en chiffres romains le nombre 1860.

La Belgique (spécialement les villes de Malines [Mechelen] et de Louvain [Leuven]) était mondialement réputée pour la fabrication de cloches. Aujourd’hui il n’y a plus de fondeurs de cloches en Belgique, il faut se rendre aux Pays-Bas pour en trouver.

Pour les placer dans le clocher de l’église il a fallu démolir le haut de celle-ci et y assembler une charpente de poutres pour les soutenir. Pour faciliter cet assemblage, les extrémités des poutres portent toutes un chiffre romain. Ainsi les charpentiers avaient des repères indiquant où chaque pièce devait trouver sa place. Nous avons remarqué que sur deux poutres qui se croisent fut gravée la date de 1860. Une fois les cloches hissées et mises en place, un nouveau clocher, en briques cette fois, fut élevée pour protéger le tout.

Etat de la petite cloche refonduë et augmentée de la 9ville en condroz
lan 1729 maintenant la grosse
Le 20 9bre 1728 pesé à huÿ la
closche cassée de la 9ville en condroz pesant 199 libvres sans boucque 197
Le 8 juillet 1729
pesé la cloche estans refondue en pnce de Mselle dewar en absence de son marit pesente 544 lib et sans boucque 540
La façon des 540 lib a 5 escus pour chaque cent pesant porte 108 fl bb
N° 135
la diminution de lib 540 a cincq libvres par chaq cent pesant porte
27 libvres a deux escalins la lib. fl
La cloche neuf pesé plus que la vielle 343 lib a deux escalins la lib
porte 343 fl
Le boueq batta pesé 20 lib et demÿ a huict sous la lib: en de contant le
vieux porte 6 fl-16 patt- 2 liards le boucque qui est dans la cloche
conte vingt quatre pattars ainsi la closche avec le batta vaut 486 fl bb
2 liards
Les paillets que le bottons de la closche tournent dessus qu’on a acheté avec la close cloche pèsent douze libvre a 2 escalins la libvre portent 12 fl bb
la diminution desdites paillets porte 12 ptt la façon de 2 paillets coûte 8 fl bb
le cuire et la corde pour suspendre le batta coûte un fl
il a coûté pour l’amener et ramener au batteau 13 ptt et pour l’amenner a l’eglise
10 ptt ce petites choses montent à 22 fl
15 ptt pour le baptiser dans la grande esglise a huÿ il a fallu une pistole

… pour le pendre et réparer la tour et les deux cordes pour sonner les deux
Choohe cloches sans conter ce quil a Fallu pour enmener la vielle et ramenner
la neuf par l’eau, le paiement de la pavée il a fallu soixante fl.bb tous est paie
comme vous voiez par la quittance

Dans le registre paroissial N°1, à la page 166, on peut lire ce qui suit :
« ce 19 mars 1758 j’ay donné pour 700 de petites hosties et 50 grandes
0-12-
item donné au margulier pour les buits de paque
1-0-0
item le 21 mars pour 3 bouteilles de vin
0-15-0
item du scavon pour faire engraisser les cloches
0-0-3 »

Et à la page 169 du même registre N°1:
« ce 6 Tbre 1758 pour 3 chandelles suivre et 3 liards scavon pour engraisser les cloches item pour une bouteille vin
0-9-3 »
« ce 27 7bre 1758 pour une bouteille vin un cent d’hostie petite et un demie cent grande
pour un cartron de scavon noire pour engraisser les cloches
0-12-1 >>>


On constate donc que pour lubrifier les extrémités des axes des deux cloches on utilise du « scavon noire » (du savon noir; nous dirions aujourd’hui du savon mou; celui que nos grands-mères appliquaient sur le linge très sale avant ébullition lors des lessives hebdomadaires).

Il y a bien existence à l’origine de deux cloches car le mot « cloche » est toujours au pluriel. De même en se référant au texte de la fonte d’une cloche plus grosse pour remplacer celle « cassée », on lit à la page 135: « et les deux cordes pour sonner les deux cloches.. ».