2083. Le moulin de Neuville-en-Condroz.

Renseignements et documents fournis par Mr Thys

Le moulin de Neuville-en-Condroz est situé le long du ruisseau de la Neuville au bout de la rue du Moulin dont il constitue le numéro 20. Avec le terrain qui l’entoure, il est repris au plan de secteur de 1987 en « zone naturelle ».

Le site est occupé depuis au moins le Moyen Age puisqu’il apparaît pour la première fois dans les écrits en 14751. A 150 m en aval de l’actuel moulin, on trouve d’ailleurs les restes d’un moulin du Moyen-âge, site appelé spécifiquement « Petit Moulin ». L’endroit n’a jamais été fouillé ni même sondé.

Vue aérienne. Doc. Mr Thys

Le bâtiment actuel du moulin est composé de trois parties. Il s’agit, respectivement en descendant vers le ruisseau:

– du bâtiment où se trouvait la machinerie du moulin. Il comporte notamment une belle porte cochère. La machinerie du moulin a malheureusement disparu, brûlée semble-t-il durant la guerre 1940-45 par les occupants de cette époque.
– du corps de logis central qui servait d’habitation au meunier.
– du bâtiment plus bas à un seul étage, anciennes écuries. Le moulin actuel, dit « Grand Moulin » apparaît spécifiquement sur la carte de Ferraris établie de 1771 à 1778 2. Il a probablement été bâti au début du XVIIIè s., puisqu’une pierre gravée au-dessus d’une fenêtre atteste du fait qu’il a été réparé en 18003. Il a été bâti en grès, très probablement tiré du talus situé juste en face ainsi qu’en témoigne la forme de ce dernier où apparaît clairement un évidement.

Plan

Le moulin ne tirait pas son énergie directement des eaux du ruisseau de la Neuville mais bien d’un étang situé à une centaine de mètres plus haut. On peut encore le constater en consultant l’atlas des cours d’eau conservé au Service Technique Provincial. Ceci présentait l’avantage de mettre le moulin à 1’abris en cas de crue du ruisseau. De plus, l’étang alimenté par un diverticule venant du ruisseau, pouvait être vidé et rempli à volonté en fonction des besoins.

Cet étang a été comblé après l’arrêt du moulin qui s’opéra aux alentours de 1870, d’après des informations recueillies dans la commune4. Un fragment de douve conservé le long du moulin témoigne de l’existence de cet ancien diverticule.

Un certain nombre d’éléments situés à proximité immédiate du « Moulin de Neuville » renforcent encore l’intérêt de l’ensemble du site :

  1. Le four banal, situé à quelques dizaines de mètres. Le four est encore en état de fonctionner.
  1. Un petit pont en pierre sèche enjambait le ruisseau et permettait de se rendre du village au hameau du Rognac.
  1. Une fontaine, dite « fontaine du Moulin » alimentée par des eaux affleurant le long du talus et provenant de la nappe aquifère sous-jacente. D’après les vieux habitants du village, les eaux de cette fontaine avaient une valeur curative pour les yeux, sans
    doute à cause de sa pureté (bien qu’aucune analyse n’en ait été faite). Au début des années soixante, certains d’entre eux venaient encore régulièrement s’approvisionner de cette eau.
  1. Des travaux en sous-terrain ont été effectués à la fin du siècle dernier lors de l’établissement de la voie du chemin de fer vicinal vers 1890 et reliant le Val St- Lambert à Clavier (dit vicinal du Condroz) jusque 1954. Il s’agissait de récolter les eaux de pluie et de rejoindre le ruisseau en passant sous la cour du moulin au moyen d’égouts voûtés. Ce système fonctionne encore aujourd’hui.
  1. Le drainage de l’ensemble de la colline actuellement boisée située à droite du ruisseau. Ce travail a été effectué vers 1840 ainsi qu’en témoigne le type de drain en terre cuite utilisé.
  1. Le site du « Petit Moulin » déjà évoqué en début de la présente note.
Façade arrière du moulin. A l’avant plan vestiges du diverticule

Bien que le Moulin de Neuville constitue un magnifique exemple de bâtiment rural à vocation industrielle, de surcroit en parfait état de conservation et d’entretien, il est très peu connu. Sa situation retirée explique notamment qu’il n’apparaisse pas dans le « Patrimoine monumental de la Belgique » 5 sous la rubrique « Neupré-Neuvi1le en Condroz ».

Une rapide étude effectuée par Mr. GENTES en 1987 sur les moulins de l’entité de Flémalle et ceux situés sur les ruisseaux y aboutissant a clairement montré que le Moulin de Neuville-en-Condroz était un des rares subsistant en bon état de conservation.

En 1996, le classement du moulin est demandé ainsi que de l’ensemble de la zone environnante, de la rue du Hock jusqu’au reste du « Petit Moulin ». Ceci est justifié à la fois par l’intérêt du bâtiment et la conservation de son environnement au sein d’une commune en urbanisation rapide dont très peu d’éléments du passé font l’objet d’une protection spécifique. A ce jour le moulin n’est toujours pas classé.

Remarque

Une étude publiée par le Centre Belge d’Histoire Rurale (UCL – 1982 – publication n° 61) sur les moulins à eau en Wallonie donne une bonne idée sur cette activité aujourd’hui disparue.

1 Arrêt de la Cour Féodale d’Hermalle-sous-Huy (Reg. 69). Repris dans Delincé, J.P. – Topographie de Neuville-en-Condroz.
2 Pour les diverses cartes, et vestiges du petit moulin, voir « les cahiers de jadis » n° 50 et 51.
3 Voir également en annexe le « Bail des deux moulins de la Neufville en Condros et de la prairie Lucas pour honorable Jean Pironet » 7 janvier 1750.
4 En annexe, on trouvera copie du rapport daté du 24 août 1848 et conservé dans « la description des Moulins et Usines » (1848). Ce manuscrit est conservé au Service Technique Provincial. A noter que l’appellation de l’époque du ruisseau de la Neuville était « ruisseau du PONCAY ».
5 Le patrimoine monumental de la Belgique – Wallonie – volume 8 – Arrondissement de Liège (tome 2). Liège 198O. P. MARDAGA éd.